La forme du récit
Bon, vous n'allez pas devenir Balzac en deux semaines, mais ce n'est pas une raison pour ne pas écrire. Donc, ne vous laissez pas décourager et lisez les conseils ci-dessous, histoire de partir, malgré tout, sur de bonnes bases.
La chronologie du récit
Au début de votre histoire, il faut donner des repères au lecteur pour qu'il sache où il se trouve dans la chronologie du récit, notamment dans le cas d'une fanfiction.
Fanfiction, Harry Potter : sommes-nous du temps des Maraudeurs, au cours de la période décrite dans les six premiers tomes, est-ce un récit racontant le futur tome 7, ou une histoire post-Poudlard ? Généralement, indiquer l'âge des personnages principaux et leur niveau d'étude suffit à renseigner le lecteur.
Ensuite, il faut indiquer l'écoulement du temps au coeur du récit. Quand commence l'histoire ? Puis au cours du récit, lier les événements et les chapitres par des indication de date et de périodes. Vous pouvez indiquer les fêtes (Halloween, Noël, Pâques), la date approximative (au milieu du mois de septembre, deux semaines avant le début des vacances de Noël) ou le temps relatif (deux jours plus tard, les trois semaines suivantes s'écoulèrent sans événement particulier jusqu'au matin où...).
Le point de vue narratif
Choisir le point de vue, c'est déterminer qui raconte le récit. C'est important, car cela donne le ton à votre histoire et détermine ce que vous allez révéler au lecteur.
Récits à la troisième personne du singulier
Un récit à la troisième personne du singulier permet de relater l'histoire d'un point de vue extérieur, avec une éventuelle focalisation sur un ou plusieurs personnages.
Le point de vue omniscient
Là, l'auteur révèle tout ce qu'il a envie : les pensées des personnages tout aussi bien que les éléments dont ils ne peuvent avoir connaissance.. C'est très pratique pour donner des informations nécessaires à la compréhension ou ménager du suspense :
La focalisation externe
L'auteur a ici un point de vue extérieur. Il peut ne raconter que ce qu'un spectateur, extérieur au récit, pourrait voir. Cela permet d'avoir une vision plus large puisqu'on peut suivre toute les scènes et tous les personnages sans trouver de prétexte pour que notre héros soit présent. En revanche, on ne sait rien des motivations et des sentiments des personnages, ce qui nuit à l'attachement du lecteur pour ces derniers.
La focalisation interne
Bien que ce soit un récit à la troisième personne, on filtre le récit par la vision que peuvent en avoir un ou plusieurs personnages.
Ainsi, J. K. Rowling a choisi une focalisation interne centrée sur Harry pour tous ses ouvrages (sauf le premier chapitre des tomes 1, 4, 6 et 7). On voit donc les mêmes choses que lui, on connaît ses sentiments, ses pensées. Par contre, on ne connaît ceux des autres personnages qu'à travers la vision d´Harry. C'est donc un récit subjectif.
Si cela se trouve, le retrait de point est parfaitement justifié ! (non, vous n'y croyez pas ?)
Cette forme permet de ménager la surprise des événements à venir et de permettre au lecteur de mieux s'identifier au héros dont il partage les sentiments.
Rapporter le récit de façon subjective n'empêche pas le lecteur de se forger une autre opinion que celle rapportée par le personnage.
Ainsi, même si Harry Potter est persuadé que Rogue est un traître à la fin du tome 6, le lecteur peut avoir une autre interprétation des événements.
Il est possible d'alterner les points de vue, pour confronter les différentes visions des personnages et suivre des actions auxquelles le héros n´est pas mêlé. Cela met en valeur de nombreux rôles secondaires ou des groupes de personnages distincts..
Ce système peut rendre les choses moins mystérieuses, moins intimes et moins palpitantes, mais c'est très intéressant et efficace pour confronter les différentes visions des personnages et de suivre des actions auxquelles le héros n'est pas mêlé. Cela met aussi en valeur de nombreux rôles secondaires ou des groupes de personnages distincts.
Une mode consiste à choisir le point de vue d'un personnage différent à chaque chapitre.
Il y a aussi le concept de Fic-mirroir : une fic reprend la même histoire d'une autre mais en choisissant une autre personnage comme acteur de la focalisation.
Récit à la première personne
L´auteur raconte l'histoire en passant par les yeux d'un narrateur. Cette méthode permet de donner une atmosphère particulière au récit et dispose le lecteur à éprouver un fort attachement envers le personnage principal. En effet, on se retrouve plongé dans les réflexions intimes à ce dernier, donnant une vision subjective des événements. Cette forme est très restrictive aussi : vous ne pouvez dire que ce que le narrateur peut savoir ou deviner. C'est parfois gênant, car cela limite ce que vous pouvez révéler au lecteur.
Le style est plus informel : on peut se permettre d'écrire comme le personnage parlerait, avec des phrases qui se coupent et qui sautent du coq à l'âne. Attention cependant de ne pas oublier de décrire les décors et l'action. Et veillez à conférer au personnage un niveau de langage et une réflexion qui correspondent à son âge, son sexe et son niveau social.
Pour avoir une idée, vous pouvez vous rapporter à L'âge de Raison ou ma sixième année de Zazan, qui adopte Drago comme narrateur. Le même auteur choisit Narcissa comme point de vue dans Malfoy cherchent bébé désespérément, mais en adoptant la seconde personne du pluriel, ce qui donne un style original et intéressant à cette histoire à chapitre unique.
Vous pouvez aussi lire Le secret de ma mère d' Alohomora, qui expose les pensées et recherches de Drago sur le passé de sa mère et aussi Ginny la furie en sixième année d'Alixe, qui est le journal intime de Ginny pendant la septième année de Harry.
Les fic-journaux intimes sont une forme particulièrement poussée de focalisation interne.
Le temps du récit
Les récits au présent
Ces récits plongent le lecteur au coeur de l'action. Ils sont très adaptés aux scènes d'action. Les événements passés sont rapportés au passé composé, les actions à venir au futur.
Les récits au passé
Les verbes sont surtout au passé simple pour les actions de premier plan, à l'imparfait pour l'arrière-plan (décor, actions secondaires, réflexions et commentaires). Les actions passées sont au plus-que-parfait.
Composer le récit
Les récits sont une succession de descriptions, actions, analyses de sentiments et dialogues. A vous d'équilibrer votre récit entre ces quatre formes. Chacune d'elles apporte des éléments différents.
La description
Pour quoi faire ?
La description est indispensable pour décrire un personnage (physiquement et moralement), planter le décor, donner une ambiance, insuffler une touche de crédibilité qui fera entrer le lecteur dans le récit. Pensez à utiliser les cinq sens ; l'odorat, le toucher, le goût et l'ouïe sont souvent négligés au profit de la vue.
Toute description doit avoir une utilité : faire rire ou toucher le lecteur, l'aider à se représenter la scène, mieux connaître les personnages, comprendre les événements à venir. Elle ne doit pas être trop longue pour ne pas lasser, tout en donnant les éléments nécessaires pour étoffer le récit.
Ces passages sont une pause dans le récit, permettant de préparer les scènes d'action ou de créer du suspense en les retardant.
Forme de la description
Classiquement, pour aider le lecteur à se construire une image mentale, on commence par donner une vue ou une impression générale, avant de préciser les détails. Mais on peut aussi suive la découverte du lieu ou de l'objet par les yeux du personnage. On note d'abord les détails qui, en s'accumulant, vont peu à peu acquérir une signification et arriver à la vision d'ensemble.
Le vocabulaire de la description
La description appelle l'usage de termes précis, voire techniques : détails architecturaux, détails anatomiques ou vestimentaires.
Le lendemain, Harry se rendit sur le Chemin de Traverse afin d'acheter ses fournitures scolaires. Il renouvela son stock d'ingrédients de potion après avoir supporté une vieille dame qui ne trouvait pas de langue de cerf assez belle à son goût. Ensuite, il dû faire la queue pendant une heure à la librairie. Le malheureux libraire fut obligé de fouiller dans sa réserve pour trouver le livre de Sorts et enchantements dont Harry avait besoin.
Enfin, il patienta longuement chez Madame Guipure pour faire rallonger ses robes, observant avec ennui les clients qui le précédaient : trois enfants qui entraient en première année et un monsieur très pointilleux sur la forme des manches de sa robe de soirée.
Avouez que c'est plus parlant que d'écrire :
Utilisez les descriptions pour donner cours à votre imagination : décrivez les robes sorcières, les objets usuels que l'on trouve dans le monde de la sorcellerie, les bâtiments. Par contre, pas la peine de traîner en longueur sur la séance de maquillage de Ginny ou le top bleu d'Hermione parfaitement assorti à son pantacourt moiré.
Enrichissez vos descriptions par l'usage de :
- adjectifs qualificatifs précis (formes, couleurs, matières...)
- verbes de perception (voir, distinguer, apercevoir, entendre, remarquer, noter, s'étonner de, etc.)
- compléments circonstanciels de temps (demain, ce soir), de lieu (dans la classe, sur son lit), de cause (par habitude), de manière (gentiment), de moyen(en voiture, avec un tournevis).
- verbes de mouvement pour dynamiser le décor (ex. : La rue serpentait parmi les échoppes où se vendaient les produits les plus incroyables.)
Les scènes d'action
C'est ce que vous préférez décrire en général et les lecteurs les affectionnent. Quand vous les écrivez, ayez comme objectif de permettre au lecteur de visualiser la scène dans sa tête : position des personnages, chronologie des mouvements.
Les situations et les combats doivent rester vraisemblables. Le héros ne peut pas faire des bonds de 5 mètres ni des sauts périlleux (c'est très esthétique dans un manga mais cela passe moins bien à l'écrit). S'il est seul contre dix, il faut expliquer comment il fait pour s'en tirer sans blessure grave.
N'abusez pas du genre non plus. Quand les périls s'enchaînent sans répit et que votre héros bénéficie d'une chance incroyable, on commence à en plus y croire et on décroche. Laissez vos lecteurs et vos personnages souffler de temps en temps; les moments forts n'en seront que plus appréciés.
Enfin, visualiser la scène dans votre tête pour ne pas faire d'erreur de montage. Par exemple évitez le :
- Tu ne viens pas avec moi.
- Comment, s'écria-t-il en se levant d'un bond.
- Non, tu iras chez ta tante pendant mon absence.
- Pas question s'insurgea-t-il en bondissant de sa chaise.
Bon, je force un peu le trait, mais vous avez compris l'idée. On a fait lever deux fois le personnage de sa chaise.
Dans la même logique
- deux personnes assises ne peuvent se prendre dans les bras, sauf si elles sont sur le même canapé.
- quand un personnage utilise un objet, il faut qu'on sache d'où il sort (Elle ouvrit son parapluie qu'elle avait pris par précaution avant de sortir)
- Si vous n'avez pas fait la liste de toutes les personnes présentes, indiquez depuis combien de temps elles sont là quand elles interviennent ("C'est d'accord", accepta Rose, qui était là elle aussi / qui était entrée pendant la tirade de Marguerite / dont Flore n'avait pas remarqué la présence)
Expression des sentiments
Tout au long du récit, le ressenti des personnages doit être précisé (dans la mesure où le style narratif vous le permet - un récit à la première personne se limite la connaissance des sentiments du narrateur). Là encore, aucun passage ne doit être gratuit : chaque introspection doit apporter amusement, connaissance du personnage ou explication de son comportement.
La connaissance des sentiment des personnages peut faire l'objet de paragraphes entiers (si c'est justifié) ou de simple adverbes (brutalement, méchamment) et expression de sentiment (avec amusement, sa voix trahissant son agacement...) disséminés dans le texte.
Les scènes érotiques
Tous les sites de fanfiction ne les acceptent pas. Vous êtes supposés vous soumettre au règlement intérieur. D'autres, les gèrent, généralement avec des warning (annonces préventives) ou tags (étiquettes) qui permettent aux lecteurs de choisir le degré d'érotisation voulu et d'éviter des récits qui le mettraient mal à l'aise.
Voir Ecrire un lemon
Les dialogues
Le style direct
C'est rapporter une conversation mot pour mot.
- Si on allait manger ! proposa Harry.
- Bonne idée, répondit Ron. Je meurs de faim.
- Ron, tu as toujours faim, de toute façon ! dit Hermione.
Poue en savoir plus, vous référer à la page consacrée aux dialogues
Le style indirect
Le style indirect consiste à rapporter des paroles, mais dans son propre discours et les paroles sont rapportées dans une subordonnée introduite par "que"
Harry dit qu'il était temps d'aller manger. Ron admit que c'était une bonne idée et Hermione soupira que Ron avait toujours faim.
Le style indirect libre
Il se passe de subordonnée :
Harry proposa d'aller manger. Ron soutint cette proposition alors qu'Hermione faisait une réflexion sur l'appétit démesuré de Ron.
L'art de l'ellipse ou comment éviter les longueurs
Passer rapidement sur certaines scènes
Il n'est pas rare de devoir passer par des scènes qui, tout en étant indispensables, sont difficiles à écrire ou lasseraient le lecteur.
Un exemple de scène-incontournable-mais-qu'il-vaut-mieux-éviter est la répartition des élèves dans les quatre maisons de Poudlard.
Cela vaut pour toutes les scènes que vous n'avez pas envie d'écrire sans pour autant pouvoir les passer entièrement sous silence.
Se placer après la scène et en résumer les grandes lignes dans une description
Après une répartition ennuyeuse au cours de laquelle le Choipeaux avait répété ses conseils d'union entre les maison et un discours, heureusement très bref, de la part du directeur, les élèves purent enfin se restaurer et monter se coucher.
Témoigner de la scène au cours d'un dialogue
"On ne pourrait pas manger avant la répartition, se plaignit Ron, alors qu'il montait enfin dans la tour de Gryffondor en compagnie de Harry et Hermione.
- C'est une cérémonie très importante, le contredit Hermione Avez-vous remarqué que le Choixpeaux nous conseille toujours l'union ? ajouta-t-elle en regardant Harry du coin de l'oeil
- C'est à Malefoy qu'il faut dire ça, rétorqua ce dernier. C'est lui qui a passé son temps à ricaner en nous regardant durant tout le repas.
Utiliser une scène d'introspection
Harry bailla en montant enfin vers sa salle commune en compagnie de ses deux amis. Heureusement que les gargouillements de faim émanant de Ron et les regards furieux que cela avait entraîné de la part d'Hermione l'avaient diverti durant l'ennuyeuse cérémonie de la répartition. Même la chanson du Choixpeau, qui n'avait fait que broder sur son chant de l'année passée, l'avait mortellement ennuyé. Sans compter que les pitreries grotesques de Malefoy avaient eu raison du peu de patience qui lui restait.
Vous remarquerez que dans les trois exemples, on a quand même fait passer des informations sur ce qui s'est passé durant la scène omise.
Ne pas répéter ce que le lecteur sait déjà
Je l'ai déjà écrit plus haut : il vaut mieux éviter de reformuler les livres que le lecteur a déjà lu. Mais cela vaut aussi pour ce que vous avez déjà décrit. Inutile de faire redire à votre personnage ce que le lecteur a vécu avec lui dans le chapitre précédent. Une fois encore, utiliser l'art de l'ellipse.
Harry résuma rapidement à Ron et Hermione ses découvertes des dernières heures
Par contre, les petits détails ou les personnages qui n'ont été que brièvement présentés plusieurs chapitres auparavant peuvent être rappelés à la mémoire du lecteur à l'occasion d'un dialogue résumant la situation.
Ne pas vous embarrasser de détails qui n'apportent rien
a moins que le détail amène une information, une description ou une touche d'humour, on donne le terme générique et on passe.
On se rapelle demain, dit-elle, avant de donner son numéro de mobile.
Dans cet exemple, donner les 10 chiffres n'auraient rien apportés (sauf d'éventuels ennuis au réel titulaire du numéro)
Conclusion
J'espère que tous ces conseils ne vous empêcherons pas d'écrire. Personne n'écrit de façon parfaite, personne ne plait à tout le monde et d'excellents écrivains font tout de travers. On les adore quand même.
Et puis, on écrit pour le plaisir, non ?